Malcolm X : un poème retrouvé de 1949 révèle les racines littéraires de sa conversion.

Malcolm X : un poème retrouvé de 1949 révèle les racines littéraires de sa conversion.

Dans une enquête publiée par NewLines Magazine, média américain primé reconnu pour ses analyses approfondies et son journalisme de terrain. Spécialisé initialement dans le Moyen-Orient avant d’étendre sa couverture mondiale, le magazine dévoile comment les archives de la prison de Norfolk livrent un nouveau visage de Malcolm X.

Un poème inédit et des correspondances de 1949, découverts récemment, révèlent la métamorphose intellectuelle du futur leader des droits civiques.

Ces documents, écrits à 24 ans sous le nom de “Red Little”, dévoilent un homme en pleine formation, passionné de littérature et de poésie.Sa correspondance avec son frère Philbert témoigne de cette évolution : “Je suis un véritable mordu de poésie”, écrit-il, “seule la poésie pourrait combler le vide immense créé par l’homme.” Il puise dans la poésie persane classique, citant le “Rubaiyat” de Hafiz sur la solitude et le “Gulistan” de Shirazi sur la foi, reflétant sa conversion naissante à l’Islam.Sa fascination pour Hafiz, maître persan du XIVe siècle surnommé “La Langue de l’Invisible”, est significative. L’œuvre de ce poète mystique, mêlant critique sociale et quête spirituelle, résonne avec ses propres questionnements.

Dans une lettre de mars 1950, Malcolm X développe des métaphores poétiques évocatrices : “Vos humbles mots de Vérité sont comme des gouttes de rosée pour ce voyageur fatigué sur les sables chauds d’un désert aride.”

La prison de Norfolk, avec sa bibliothèque de 15 000 volumes léguée par le sénateur Lewis Parkhurst, joua un rôle crucial. Son programme progressiste, initié par Howard Belding Gill, incluait un orchestre, une équipe de débat reconnue nationalement ayant vaincu Harvard et Oxford, et un journal bimensuel. Cette “société fermée” favorisait la réhabilitation intellectuelle plutôt que la simple punition.Les échanges avec son ami Malcolm Jarvis et les visites d’Abdul Hameed, un musulman ahmadiyya, illustrent un cheminement spirituel partagé, particulièrement significatif en 1949 lorsque Jarvis traversait une période suicidaire après le décès de son épouse. Ces relations nourrirent sa réflexion sur la foi et la société.

Malcolm X consacra ses nuits à la lecture intensive, au point d’en affecter sa vue. Il étudiait l’étymologie dans “The Loom of Language” de Frederik Bodmer et pratiquait quotidiennement des exercices de vocabulaire. “Je savais, là en prison, que la lecture avait changé pour toujours le cours de ma vie”, confiera-t-il plus tard à son biographe Alex Haley.

Ces documents, salués par sa fille Ilyasah Shabazz comme une “pièce manquante”, révèlent un Malcolm X méconnu : un intellectuel en formation, maniant habilement les références littéraires pour exprimer ses réflexions sur la vie, la foi et la société. Cette correspondance bouscule l’image simplifiée de sa conversion, montrant les fondements littéraires et philosophiques du leader éloquent qu’il deviendrait.

Au-delà du récit conventionnel d’une simple conversion religieuse, ces archives dévoilent un processus complexe d’évolution intellectuelle. Sa lecture assidue des poètes persans, ses réflexions sur le langage et ses questionnements philosophiques dessinent le portrait d’un homme construisant méthodiquement sa pensée. Cette dimension littéraire explique la sophistication de ses discours ultérieurs et sa capacité à articuler une critique sociale profonde. Le paradoxe d’une liberté intellectuelle trouvée dans l’enfermement devient ici le moteur d’une transformation qui dépasse le cadre religieux pour embrasser une vision globale de la condition humaine.

De Oumma. Com

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